Franck Béria, puissance 300 !

PAR FRÉDÉRIC COUDRAIS
 
Lors du déplacement à Bastia (0-1), samedi passé, Franck Béria a disputé son 300e match de Ligue 1 (55 avec Metz, 245 au LOSC). Une étape importante dans sa carrière qu’il a vécu - comme toujours - avec beaucoup d’humilité. À 33 ans, celui qui compte 312 rencontres jouées sous la tunique losciste, toutes compétitions confondues (245 en L1, 40 en coupe d’Europe, 26 en coupes nationales et 1 en trophée des champions), a ouvert le livre de sa riche carrière parmi l’élite.
 

Franck, tu as franchi à Bastia le cap des 300 matchs de L1. Ça représente quoi pour toi ?
Une certaine longévité, même si ce n’est pas une fin en soi. Parce que ça reste un cap personnel et dans ma carrière, j’ai toujours existé grâce au collectif. C’est un stat’ que j’aborde avec beaucoup de pudeur. Je me souviens que lorsque je suis arrivé au club, j’étais assis dans le vestiaire à côté de Grégory Tafforeau. Et lui fêtait sa 200e… j’étais très impressionné. À l’époque, il m’a dit : je pense que tu vas aller bien au-delà de ce chiffre. Et lors de ma première année ici, j’ai fait tous les matchs de championnat (38). Ça m’a donné des idées pour la suite. J’ai aussi pu constater que dans le foot, le plus difficile est de durer. La véritable valeur d’un joueur est d’exister dans le temps.
 
Quand tu te retournes sur ton parcours, j’imagine que tu éprouves une certaine fierté…
Au fil des années, les supporters changent, les objectifs et les dirigeants aussi. Le football évolue, les attentes sont différentes. Et moi, j’ai pu le vivre au sein du même club. J’ai donc beaucoup de chance, je suis vraiment un privilégié. Dans l’effectif actuel, j’espère que des joueurs comme Seb’ Corchia ou Ibrahim Amadou vont suivre cette voie. Je leur ai d’ailleurs dit quand ils m’ont chambré sur ma 300e, en leur transmettant le même message que celui de Greg Tafforeau, dix ans plus tôt. Parce que pour moi, c’est ça le sens d’une carrière : transmettre. Pour que ces valeurs puissent perdurer à travers les générations. C’est là que réside ma fierté.

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Tu vas boucler une dizaine saison au LOSC…
Le temps passe… Chaque année, tu refais le point avec toi-même et tu dois aller chercher des leitmotivs, des objectifs personnels, avec des joueurs différents. Et une année on vise la Champions League, l’autre on joue le titre, ou comme en ce moment, le maintien. Mais à chaque fois, il faut que tu puisses te nourrir de ce que tu emmagasines comme expérience, mais aussi que tu sois souhaité et utile au sein du groupe et du club. J’estime que mon métier n’est pas le plus simple, par contre, c’est le plus beau.
 
Quel est le moment le plus fort que tu as vécu au LOSC ?
J’ai forcément envie de te dire le doublé en 2011, mais non… ce qui me vient à l’esprit en premier lieu, c’est ma signature, lorsque je suis arrivé au club. Toutes les structures actuelles n’existaient pas encore à Luchin. Ce moment m’a marqué car j’avais tout à prouver. Et ce n’est pas parce que j’avais été élu meilleur latéral de Ligue 2 que j’allais impressionner qui que ce soit ici. Il fallait que je me mesure à des joueurs comme Chalmé ou Lichtsteiner. Par la suite, j’ai eu la chance d’accompagner ou d’être en concurrence avec des éléments comme Debuchy ou Digne. Et je peux te dire que les entraîneurs devaient se gratter la tête pour savoir qui mettre sur le terrain. C’est ce qui fait qu’en 2007, on a débuté un cycle qui a débouché sur un doublé en 2011.
 
Le joueur qui t’a le plus marqué…
Je ne vais pas te citer un nom en particulier. Par contre, j’ai croisé de nombreux talents, certains ont été dignes du maillot, d’autres moins. Je retiens surtout tous les joueurs qui n’ont pas pu s’imposer ici. Ils étaient bons à l’entraînement, mais au final, ils jouaient en CFA le week-end. Ils n’ont malheureusement pas eu leur chance car il y avait du monde devant eux, dont moi. Et tous les jours, ils avaient la banane. Car ce n’est vraiment pas évident quand tu ne joues pas et que tu n’as jamais ta chance, de garder une ligne de conduite et un esprit  collectif. Je prends beaucoup de plaisir lorsque je les recroise.

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Ton premier match en L1, comme un clin d’œil, c’est un Metz-LOSC (0-1, le 06/03/02). Tu en gardes quel souvenir aujourd’hui ?
J’avais 18 ans et je venais de jouer en CFA. Le lendemain, l’entraîneur, Gilbert Gress, me demande de venir à l’entraînement avec les pros. Il faut savoir qu’à l’époque, il y avait seulement un ou deux jeunes de la formation dans le groupe. Aujourd’hui, c’est l’inverse. Tu ne faisais donc pas trop le malin. Au final, il me convoque pour la mise au vert. Et le match arrive, on reçoit Lille, je suis titulaire sur le côté droit de la défense.
 
Tu ressens quoi sur le moment ?
Je me souviens que je portais ce jour-là le numéro 6. Et quand j’arrive dans le vestiaire, je vois le maillot avec mon nom pour la première fois. Ça marque… Sur le terrain, on perd 1-0 et je me retrouve face à des joueurs comme Bakari, Brunel, Cheyrou, Malicki, Tafforeau, Cygan… Pour moi, c’était juste incroyable. Derrière, je ne suis plus jamais sorti du groupe. J’ai dû continuer à bosser car je n’étais pas encore vraiment prêt. J’avais besoin de m’acclimater à l’exigence professionnelle. Et par la suite, j’ai eu la chance de travailler avec des coachs comme Jean Fernandez ou Claude Puel, pour grandir… c’est le top.
 

“Dans le foot, le plus difficile est de durer. La véritable valeur d’un joueur est d’exister dans le temps”

 
Le 100e, c’était lors d’un Monaco-LOSC (0-2, le 28/09/08)…
Pour le ranger dans la boite à souvenirs, il fallait le gagner. Ce que nous avions su faire. Et aller s’imposer à Monaco n’a jamais été simple. Ensuite, le 200e, c’était sur un OL-LOSC  (défaite 2-1, le 10/03/12). Je n’en garde pas un bon souvenir, face à un Lyon redoutable, d’autant qu’on devait assumer chaque week-end notre statut de champion de France en titre.
Aller gagner là-bas, on l’a fait cette année (1-2, le 28/01/17), c’est compliqué et éprouvant.

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Tu as aussi 4 buts à ton actif en L1… Ça t’inspire quoi ?
C’est énorme comme chiffre (il se marre). Forcément, avec seulement quatre buts au compteur, je me souviens de chacun : à Lens (1-2, le 11/03/08), contre le PSG (3-1, le 16/01/10), à Caen (2-5, le 13/11/10) et à Nice (1-1, 27/08/16). Mais le plus fort, c’est mon premier, à Bollaert lors d’un derby. C’est plus que jouissif, d’autant que mon but nous permet de repartir avec la victoire. Je pense que c’est à partir de ce moment-là que pour les supporters, je suis devenu un vrai Lillois (rires).
 
Ce vendredi, vous recevez Nice au Stade Pierre Mauroy. Ton avis ?
C’est une belle affiche face à une formation qui dégage une vraie force collective. C’est une grosse équipe de notre championnat et on sait que les Niçois sont capables de gagner à l’extérieur. Et nous, on a du mal à la maison depuis un bon moment. Mais dans notre situation, pour s’en sortir, il nous faut au moins deux victoires à domicile. On a besoin d’être maître de notre destin et on a le potentiel pour y arriver.
 
Merci et bravo Franck Béria. Pour soutenir les Dogues demain soir à l’occasion de ce #LOSCOGCN, direction la billetterie en ligne.

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