Gérard Bernardet : "Lille-Lourdes à vélo, ça fait loin !"

Au début de l’été, nous donnions la parole à Nicolas Girard, le nouvel entraîneur adjoint du LOSC. Présentation, parcours, objectifs... il nous dévoilait les enjeux du nouveau cycle sportif lillois. En plein cœur de la première trêve internationale de la saison, nous partons aujourd’hui à la découverte de Gérard Bernardet (57 ans), l’autre bras droit de René Girard. Entretien.

Gérard, bonjour. Quel regard portes-tu sur le début de saison du LOSC ?
Je le juge plutôt bon. J’ai trouvé ici un groupe respectueux, travailleur et agréable à entraîner, doté d’un superbe état d’esprit. Sur le plan comptable, ce n’est pas mal, même s’il reste encore à progresser dans le jeu. Tâchons maintenant d’enchaîner avec la réception de Nice pour rester au contact du haut du classement. D’autant que tout est encore très serré.

Cette semaine, le groupe est amputé de ses dix internationaux. Dans ce contexte, comment s’organisent vos entraînements ? 
De la même façon, avec un travail peut être encore plus intensif. Nous avons sollicité Rachid Chihab pour que quelques jeunes intègrent le groupe d’entraînement. On essaye de baser les séances sur des petits exercices assez explosifs devant le but. Les garçons sont à l’écoute, même si l’esprit de compétition est moindre du fait de l’absence de match. Mais croyez-moi, ils travaillent beaucoup.

Pour les jeunes supporters qui n’ont pas connu le meneur de jeu très technique que tu étais, peux-tu présenter ton parcours ?
J’ai démarré au CEP Lorient, un petit club de la ville dans lequel j’ai été remarqué par Jean Vincent qui m’a recruté et lancé au FC Lorient. J’ai ensuite signé à Cannes (1977-1980, D2) et à Valenciennes (1980-1981, D1). Tout s’est très bien passé dans le Nord, j’y ai vécu une belle saison, mais j’ai été obligé de rentrer en Bretagne pour des raisons familiales. Direction Brest (1981-1983, D1), puis Mulhouse (1983-1985, D2) où le projet sportif se voulait ambitieux avec Gérard Banide, puis Raymond Domenech aux commandes. Nous avons raté la montée de peu. Je suis finalement retourné à Brest (1985-1986, D1) avant de rallier Montpellier (1986-1989, D2).

Et cette fois, tu ne manques pas l’accession à l’élite…
Effectivement, nous montons et terminons troisième de D1 la saison suivante. Nous sommes alors en 1989, je suis probablement au summum de ma carrière, si bien que l’OM me recrute en cours de saison. Nous signons le doublé coupe-championnat avec les Papin, Sauzée, Cantona, Allofs, Förster…L’âge avançant, et la concurrence s’accentuant (le club avait notamment recruté Waddle et Francescoli), je m’engage à Toulon (1989-1990), sous la houlette de Rolland Courbis, avant de finir à Nîmes (1990-1993, D2, puis D1) aux côtés de René Girard.

« Formateur, c’est un métier très difficile. Je tire mon chapeau à tous ces éducateurs dans l’âme »

Tu raccroches les crampons et embrasses alors la carrière de coach, toujours à Nîmes.
D’abord à la formation, puis en tant qu’adjoint de Denis Lavagne, Josip Skoblar… et René Girard. Vient ensuite Montpellier (2002-2004) où là encore, je commence chez les jeunes ainsi qu’avec l’équipe corpo du Groupe Nicollin, avant de devenir le bras droit de Jean-Louis Gasset, puis Michel Mézy chez les A.

Le moment est alors venu pour toi de te glisser à ton tour dans le fauteuil d’entraîneur principal du MHSC après leur départ…
Ce n’était pas du tout prévu. À la base, le président m’avait demandé de prendre l’équipe pendant deux jours, le temps que Robert Nouzaret arrive. Sauf qu’il n’est jamais venu. Je suis resté un match, puis deux, avant d’être confirmé et de participer au maintien du club. En comptant la saison suivante, j’ai dû cumuler une cinquantaine de matchs de Ligue 1 sur le banc. Une belle expérience.

« Avec René, on se connaît depuis presque 30 ans. Nous avons les mêmes valeurs »

Après un détour par Cannes (2004-2006, National), tu retrouves Montpellier, cette fois comme éducateur.
Je suis resté 7 ans au centre de formation, à la tête des U17 ou des U19, voyant passer des générations entières de joueurs. Formateur, c’est un métier très difficile. Et pas uniquement sur le terrain. Il existe toute une dimension éducative à prendre en compte. Il faut avoir ça dans la peau. C’est pourquoi je tire mon chapeau à tous ces éducateurs dans l’âme, rigoureux et déterminés, comme l’est notamment Rachid Chihab.

Il y a quelques mois, ton téléphone sonne. C’est René Girard qui te propose de l’assister au LOSC. Comment as-tu accueilli cette proposition ?
Avec enthousiasme, forcément. René savait que je voulais retravailler avec lui. On se connaît depuis presque trente ans, nous avons les mêmes valeurs. On n’a jamais coupé le contact, jouant parfois ensemble pour le Variété Club de France. Quand il m’a offert la possibilité de le rejoindre ici, je n’ai pas hésité une seconde. Le LOSC est un super club, l’un des plus grands du championnat.

En quoi consiste aujourd’hui ta mission au sein du staff ?
Il s’agit de soulager l’entraîneur durant les séances tout en étant assez proche des joueurs, sans trop l’être non plus. Je partage cette tâche avec Nico (Girard). On s’entend très bien. Nous marchons dans la même direction. René aime nous questionner sur nos ressentis. On partage beaucoup tous ensemble, que ce soit avec "Momote" (Jean-Pierre Mottet) et l’ensemble du staff.

Quand on tape ton nom sur Google, on trouve cet incroyable défi que tu t’étais lancé en 2003. Tu nous racontes ?
(il sourit) C’était peu de temps après être devenu coach de Montpellier. Nous comptions treize points de retard sur le premier non reléguable à quelques journées de la fin. Je lance donc aux journalistes, sans trop réfléchir : "Si le miracle de se sauver se produit, je suis prêt à rallier Lourdes en vélo". Ils ne m’ont plus jamais quitté avec cette boutade, si bien qu’après nous être sauvés de façon assez extraordinaire, j’ai dû assumer. Avec deux copains et une voiture balai, nous avons organisé ce périple sur trois étapes : 500 kilomètres, sept heures de vélo par jour. À la fin, je ne pouvais même plus m’asseoir !

Es-tu prêt à formuler le même type de pari au LOSC ?
(il se marre) Je suis capable de promettre plein de choses pour qu’on soit européen cette saison. Même si Lille-Lourdes à vélo, ça risque de faire un peu loin…

Un grand merci à Gérard Bernardet pour sa disponibilité.