​"En arrêtant le championnat, on me retirait ma sortie entre potes"

PAR MAXIME POUSSET

Et eux, supporters lillois, comment-ont-ils vécu 2020 ? Entre frustrations intenses et joies immenses, ils nous racontent cette année singulière. À l’heure de refermer 2020, remontons-en le fil en trois actes, avec Kevin, Louise et Christophe, trois fervents amoureux du LOSC comme témoins.

PREMIERE PARTIE : Mars 2020, saison arrêtée, Lillois frustrés… Et confinés.

D’abord, les présentations

Kevin : « Moi, c’est Kevin, 31 ans, originaire de Marcq-en-Barœul, abonné au LOSC depuis plus de 10 ans et membre des Dogues de Paris, car je vis en région parisienne où je suis ingénieur en sureté. Je "remonte", enfin je remontais dans le Nord à chaque match à domicile, sans compter quelques déplacements chaque saison. Je suis notamment allé à Chelsea l’an dernier. Un super souvenir. »

LOUISE2.jpgLouise : « Louise, 32 ans, j’habite à Lille et je travaille dans la communication. Je vais au stade depuis l’âge de 8 ans, à Grimonprez-Jooris, en D2 et suis abonnée depuis 2004. J’ai seulement raté une saison car j’étais expatriée à Vancouver, mais j’arrivais quand même à suivre les matchs à 8 heures du matin. Heureusement, j’ai pu assister à cette fin de saison-là. Et quelle saison, puisque c’était 2010-2011. Le LOSC a toujours fait partie de ma vie. C’est une passion que je partage avec toute ma famille et mes amis. »

Christophe : « Moi, c’est Christophe, j’ai 38 ans depuis le 23 décembre, je vis à Ronchin et je suis en création d’entreprise. Je supporte le LOSC depuis 1994 malgré un papa supporter lensois... À l’époque, je jouais au foot à Wattignies et chaque club était à tour de rôle invité à venir voir un match du LOSC à Grimonprez. J’ai adoré. J’y suis ensuite retourné avec un copain pendant mon adolescence. Je n’ai jamais arrêté de suivre le club. J’allais au stade 5 à 10 fois par an, jusqu’à m’abonner en tribune active en 2012, à l’entrée au Stade Pierre Mauroy où je passe donc tous les matchs debout à chanter pour mon équipe. »


2019-2020, fin de saison précipitée

Louise : « Quand je repense à cette fin de saison, je revois LOSC-Lyon (1-0, le 8 mars). J’y étais et ce soir-là, on sentait que la situation sanitaire commençait à se tendre. On savait que l’arrêt du championnat nous pendait au nez. Avec le recul, je vois ce match comme une sorte de grande fête de fin de saison sans que nous le sachions sur le moment, avec une super victoire à la clé. »

KEVIN.pngKevin : « J’étais en vacances en Islande à ce moment-là, j’ai donc raté ce match contre Lyon. Une victoire très importante qui nous permet de faire un bond au classement et qui nous laisse l’impression de filer vers le podium. L’équipe tournait à plein régime, Renato commençait à avoir un volume de jeu impressionnant. On allait revenir sur Rennes et Marseille, j’en suis persuadé. Sur le coup, on se dit que la suite de la saison va se jouer à huis clos, ce qui est déjà une énorme frustration pour le supporter que je suis, mais on est loin d’imaginer que tout est terminé. »

Christophe : « Je me souviens qu’on avait plus ou moins raté notre début d’année 2020 avant d’enchainer une grosse série de victoires à partir de février. Alors forcément, quand on apprend que le championnat s’arrête, on est déçu, on se dit qu’on pouvait aller chercher Rennes et même aller dire bonjour à Marseille, avec quelques faux pas. Le LOSC aurait pu finir deuxième. Donc oui, ce qui prédomine à ce moment-là, c’est surtout la frustration. »

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Le LOSC qualifié pour l’Europa League. Bonne ou mauvaise nouvelle ?

Louise : « Je suis de nature à me satisfaire de ce que j’ai. Si on m’avait dit qu’on terminerait 4ème en début de saison dernière, j’aurais signé. Vous savez, j’ai vécu un Lorient-LOSC au Moustoir en 2010 où nous ratons la Champions League sur le fil. Je suis rentrée chez moi en pleurant ce jour-là. C’est donc peut-être le traumatisme de tout perdre qui me fait maintenant adopter cette posture-là. Alors OK, on rate le podium, la dynamique était positive, mais on ne sait pas comment l’équipe aurait joué après cette coupure, si ça avait repris. Là, on nous donne l’Europa League, une compétition qui est d’ailleurs plus adaptée au LOSC à ce moment-là, surtout avec l’expérience accumulée en Champions League. L’avenir allait d’ailleurs le confirmer puisqu’on s’est qualifiés. »

Kevin : « Moi j’étais frustré de rater la qualification pour la Champions League. On avait et on a même aujourd’hui encore plus de qualité dans le groupe. On sentait une équipe qui montait en puissance après un début de saison plus délicat à cause de la Champions League. On avait franchi un cap dans la gestion des matchs. On la méritait, cette Champions League ! »

Christophe : « Je n’ai jamais cru en une reprise du championnat. En revanche, j’ai été très déçu de voir le classement figé. J’aurais espéré qu’ils mettent en place un système de calcul en pondérant les rencontres déjà jouées en fonction du classement. Parce que quand vous avez joué et perdu contre le PSG, cette défaite ne devrait pas valoir autant qu’une défaite contre le dernier. Quand je vois que Rennes devait encore affronter un Lyon qui remontait en flèche et un Paris qui filait vers le titre alors que nous les avions déjà affrontés, je me dis que l’équité sportive n’a pas été respectée. J’ai donc perçu tout ça comme une injustice. »

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Et commence alors le (premier) confinement. Sans foot. Sans LOSC…

Kevin : « Le confinement a été dur à vivre sur le plan humain, car je n’ai pas pu remonter dans le Nord pendant trois mois, là où je revenais habituellement tous les quinze jours. Je ne dirais pas que le foot est passé au second plan, car il apporte de la vie, du plaisir dans notre quotidien, mais j’ai plus souffert du manque de mes proches. J’ai toujours travaillé, même davantage. Le sport m’a aussi beaucoup manqué. Je fais du tennis de table et toutes les compétitions ont été arrêtées. Car au-delà du sport comme activité, c’est aussi un vecteur de rassemblements, d’échanges. Et là, tout s’arrête d’un coup. »

IMG-20201110-WA0000.jpgChristophe : « Ç’a été assez compliqué à vivre... J’étais en recherche d’emploi à ce moment-là. C’est d’ailleurs ce premier confinement qui m’en a dégouté et qui m’a poussé à monter mon propre projet professionnel. Je suis donc resté à la maison à m’occuper de mes enfants qui sont assez… "dynamiques". Il y a quand même eu de bons moments, car j’ai mis ma disponibilité au service de voisins et amis qui m’ont confié leurs enfants une fois par semaine. C’était plutôt fun d’avoir jusqu’à huit gamins à la maison. On faisait école le matin, puis activités l’après-midi. Le vrai manque se situait surtout dans les sorties, les amis, la famille. Et puis le LOSC aussi. Pour moi, la sortie au stade a toujours été un bon moment entre potes. Et là, on me la retirait. C’était dur. »

Louise : « J’ai démarré cette période en déclarant le Covid, deux jours avant l’annonce du confinement. Par chance je n’ai pas développé de forme grave. J’étais surtout inquiète pour mes proches, car je vis dans une famille de soignants. Mes parents et mon frère son médecins, ma sœur est pharmacienne. Et pour eux, ç’a été très dur. À titre personnel, passées ces trois semaines de fièvre et de toux, j’ai eu la chance de vivre ce premier confinement de façon assez sereine, en télétravail et en famille. J’en ai profité pour passer plus de temps avec mes proches. Côté LOSC, la frustration était énorme de vivre des week-ends de printemps sans foot et sans LOSC. Ça m’a beaucoup manqué. »

Lundi, retrouvez la deuxième partie de notre interview croisée avec Louise, Christophe et Kevin : « Mai 2020, déconfinés et enthousiastes avant le mercato d’été ».