L'interview

Tiago Santos, le feu dans les jambes

Dans son couloir droit, il percute, il perfore, il transperce. Derrière, au milieu ou devant, Tiago Santos avale les kilomètres avec beaucoup de générosité. Arrivé chez les Dogues cet été, le jeune talent portugais peut être considéré comme l’une des révélations du début de saison lillois. Mais le connaissez-vous vraiment ?

Les supporters ont découvert Tiago Santos sur le terrain, mais qui est l’homme derrière le joueur ? Peux-tu te présenter à nous ?
(il sourit) Je suis originaire de Lisbonne. J’y suis né et j’y ai toujours vécu. J’ai grandi à Oeiras, une ville de l’agglomération lisboète, dans le quartier de Paço d’Arcos. C’est un endroit très joli, près de la plage. J’ai un grand frère, Gonçalo, qui a deux ans de plus que moi. Ma mère travaille dans les télécommunications et mon père, qui est d’origine angolaise, dans la comptabilité.

Comment es-tu venu au football ?
Je ne suis pas issu d’une famille de footballeurs. Mon frère était plutôt branché athlétisme, avec une spécialisation pour le triple saut et le 100 mètres. Mais il s’est finalement concentré sur ses études. Je suis donc le premier membre de la famille à jouer au foot au haut niveau. J’ai commencé très, très jeune, à l’école, puis au club de ma ville, à Oeiras. J’y suis resté un an avant d’être détecté par le Sporting CP lors d’un tournoi. À l’époque, j’évoluais devant, que ce soit sur les côtés ou dans l’axe.

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Tu rejoins alors le Sporting Club de Portugal, l’un des plus grands clubs du pays, réputé pour avoir formé des joueurs comme Cristiano Ronaldo ou Rafael Leão. Tu étais alors lancé sur la voie du succès…
Le chemin était encore long. En tout, j’ai passé 11 ans au Sporting. Je dis « en tout » car j’ai quitté le club pendant un an et demi, entre 15 et 17 ans. Je suis revenu à Oeiras pour finir la saison 2017-2018, puis j’ai signé à Sacavenense, un autre petit club de la banlieue de Lisbonne en 2018-2019. Tu sais, parfois le chemin que nous suivons n’est pas tout droit. C’est comme ça, c’est la vie. Je crois qu’à ce moment-là, c’était le meilleur choix pour moi de partir. J’en avais besoin pour ma progression. Mais deux ans après mon départ, le Sporting m’a proposé de revenir. J’y suis donc retourné en 2019 pour finir ma formation.

Tu n'as pourtant jamais évolué chez les pros sous ce maillot vert et blanc. Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Deux ans plus tard, j’ai reçu une proposition d’Estoril, qui est aussi le club d’une ville de la région de Lisbonne. Ils avaient un bon projet pour moi et pour d’autres jeunes joueurs : celui de nous accompagner dans notre progression jusqu’à nous mener à l’équipe première, qui évolue en première division. J’ai donc rejoint l’équipe U23 d’Estoril pour la deuxième partie de saison 2021-2022. C’est une ligue de développement qui nous aide à élever notre niveau et à intégrer le groupe professionnel. Je crois que mon passage dans ce championnat a été déterminant dans ma progression, car j’ai été appelé chez les pros dès l’été suivant.

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"Mes parents sont très importants pour moi. Les savoir heureux a un énorme impact sur mes performances sportives"

Été 2022, te voilà donc dans le grand bain de la Liga Portugal. Tu t’y adaptes extrêmement vite puisque tu t’imposes comme un titulaire dès la 3ème journée et y dispute 30 matchs sur l’ensemble de la saison…
En première division portugaise, la moindre erreur, le moindre détail se payent cash. Il y a aussi beaucoup plus d’intensité. C’est vraiment un niveau supérieur. Mais j’ai vite réussi à me hisser. J’ai toujours eu confiance en mon potentiel. Comme je l’ai toujours dit à ma famille, je n’ai besoin que d’une chance pour performer et pour monter ce que je sais faire. Estoril et son entraîneur d’alors, Nélson Veríssimo, m’ont donné cette chance. C’était une grande année pour moi, personnellement comme sportivement.

L’été dernier tu rejoins le LOSC. Nouveau pays, nouvelle langue, nouveau championnat, nouveau club… Était-ce pour toi un grand saut dans l’inconnu ?
(il réfléchit) On peut dire que ça a été un nouveau chapitre, un nouveau challenge. Le LOSC possède une belle histoire. Je suis ici dans un grand club, avec de joueurs de qualité. Tout est différent dans la vie ici, mais l’adaptation a là encore été très bonne. La météo n’est pas le même, c’est vrai (il se marre), même si parfois il fait très chaud. Les partenaires, le coach, le staff, tout le monde fait en sorte que je me sente bien.

Le fait qu’il y ait beaucoup de lusophones au sein du LOSC t’a-t-il aidé dans ton acclimatation ?
Oui bien sûr ! Ça a même été très important. Quand je suis arrivé ici, le premier avec qui j’ai échangé a été Tiago Djalo. Je l’ai connu au Sporting CP. Il m’a fait me sentir à l’aise, il m’a expliqué le fonctionnement du club. Je me sens très bien ici à Lille. La ville est belle et agréable. Je suis bien sûr un peu loin de ma famille et de mes amis, mais quand on a des rêves, des objectifs, il faut savoir faire des sacrifices pour les réaliser.

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La famille, c’est important pour toi ?
(sans hésiter) C’est même la chose la plus importante. Quand j’évoluais au Portugal, j’ai toujours vécu chez mes parents, car j’ai toujours joué dans des clubs de la banlieue de Lisbonne. Ils sont mes premiers supporters. La saison dernière, ma première en première division, ils ont énormément voyagé pour me suivre à travers le pays. Ils prenaient le train, la voiture, et ils venaient me voir là où je jouais. Les savoir heureux a un énorme impact sur mes performances sportives.

Revenons au LOSC. Quel regard portes-tu sur votre première partie de saison ?
Je pense qu’on a réalisé une bonne première partie de saison. Nous sommes dans le haut du classement en Ligue 1 et qualifiés en Europa Conférence League, mais nous ne sommes pas satisfaits. On doit continuer de travailler. On sait ce qu’on doit faire pour aller chercher encore plus haut. On travaille beaucoup et bien. Nos résultats le montrent, mais il faut continuer. Nous ne sommes qu’à la mi-saison.

Quelle est votre force ?
(il réfléchit longuement) Nous avons beaucoup de qualités comme notre capacité à mettre de l’intensité, à travailler tous ensemble sur un seul objectif, puis à l’accomplir. L’état d’esprit de l’équipe est sensationnel. Il reflète la mentalité du club, mais aussi la philosophie du coach.

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"Mon but à Lyon ? Quand j’ai vu que ballon au fond, j’ai ressenti un immense bonheur. Mais ce n’est pas le fruit du hasard. C’est le reflet de plusieurs séances d’entraînement, de répétition d’exercices"

À titre personnel, que penses-tu de tes premiers pas en Ligue 1 ?
(il réfléchit) J’ai joué beaucoup de matchs. Bien sûr, j’ai connu des hauts et des bas, mais de façon générale, je pense que j’ai réussi de bons débuts. Ça pourrait être meilleur et ça va être meilleur, j’en suis persuadé. Je dois continuer de travailler. Sur le terrain, j’essaye de toujours garder confiance en moi, de rester calme. Ça fait partie de mon jeu. Peu importe qui est l’adversaire en face, je montre ma personnalité.

Contre Lyon tu as marqué ton premier but. Un grand souvenir, j’imagine…
Oh oui ! Je m’en souviens très bien (il sourit). Marquer mon premier but en Ligue 1 et même plus globalement, mon premier but chez les professionnels est quelque chose que je souhaitais depuis longtemps et pour lequel j’ai beaucoup travaillé. Ça m’a vraiment fait très plaisir. Quand j’ai vu que le ballon était au fond, j’ai ressenti un immense bonheur. Mais ce n’est pas le fruit du hasard. C’est le reflet de plusieurs séances d’entraînement, de répétition d’exercices.

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2023 restera une année spéciale pour toi qui a également découvert l’Europe et la sélection nationale espoirs. Ça en fait des émotions !
Ça on peut le dire ! Je n’avais jamais été en équipe nationale, même chez les plus jeunes. C’était vraiment ma toute première fois. Représenter son pays est un grand honneur. Je ne peux pas décrire ce que j’ai ressenti quand on a chanté l’hymne. Mon rêve, c’est de jouer en équipe nationale A du Portugal. Il y a encore beaucoup de travail pour y arriver, mais j’espère pouvoir accomplir cet objectif un jour.

2024 s’ouvre à nous. Quels sont tes objectifs individuels sur cette nouvelle année ?
D’abord apprendre le Français. C’est en cours, je progresse, j’apprends des mots chaque jour, mais c’est long. J’espère pouvoir faire notre prochaine interview ensemble en Français. Sur le terrain, j’aimerais encore progresser pour atteindre un meilleur niveau. Je voudrais améliorer mes stats’, qu’elles soient offensives ou défensives. Mieux défendre, marquer davantage, faire plus de passes décisives. Je suis défenseur. Ma première mission est donc de défendre, même si c’est un poste que j’ai découvert vers l’âge de 18 ans. À la base, je suis un ailier. Mais j’ai toujours aimé arpenter le couloir pour attaquer et défendre.

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