L'avant-match

Martiniquais et Lillois, la parole à Steeve Elana

Le LOSC, il connaît, il a eu le Dogue brodé sur le maillot pendant 4 saisons (2012-2016). La Martinique, il connaît aussi, lui qui a défendu les couleurs de la sélection nationale. Il sera d’ailleurs ce samedi au Stade Pierre Mauroy pour commenter LOSC-Golden Lion pour le compte de France Télévision. Avant ce 1/32ème de finale de Coupe de France, donnons la parole à Steeve Elana.

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Que deviens-tu, Steeve Elana ?
J’ai arrêté ma carrière en 2021 après une dernière saison à Martigues. J’ai ensuite monté une académie de football à Aix-en-Provence, aux côtés de Ronald Zubar (ex-OM) : la ZE Football Academy. Parallèlement, j’entraîne l’équipe U18 féminines d’Aix (R1). Ma fille y évoluait jusqu’à l’année dernière. Elle est d’ailleurs gardienne de but. Cette saison, elle est en sports-études à Valence, mais je continue de coacher ses anciennes partenaires. Et à côté de tout ça, j’ai monté une boîte de conseil en profilage comportemental. C’est du coaching, de l’accompagnement, que ce soit dans le milieu du sport pour de la préparation mentale ou de l’entreprise pour les managers.

Revenons un peu sur tes années lilloises. Lorsque tu rejoins le LOSC en 2012, tu débarques dans un club qualifié pour la Champions League, qui entre dans son nouveau « Grand Stade ». J’imagine que c’était un nouvelle dimension pour toi qui arrivait alors de Brest…
Tout à fait, c’était un nouveau palier. J'étais au club depuis 7 ans, avec une vraie équipe de potes. Nous avions contribué avec mes coéquipiers à écrire l’Histoire du Stade Brestois puisque nous sommes remontés en Ligue 1 et nous nous y sommes maintenus deux ans de suite. Là, je débarquais au LOSC dans une équipe d’internationaux, avec des objectifs européens. C’était un changement radical.

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Tu arrives en tant que doublure de Mickaël Landreau. Tu débutes donc la saison avec cette casquette, jusqu’à ce que tu deviennes titulaire.
Les choses ont un peu évolué au fil de la saison. Mickaël Landreau a quitté le club en cours de saison, j’ai donc dû m’adapter. Ça n’a pas été un problème car j’avais déjà joué durant la première partie de saison, notamment en Coupe de la Ligue et en Champions League. L’été suivant, changement de coach et retour de Vincent Enyeama, qui avait été prêté en 2012-2013. Je suis redevenu numéro 2. J’ai tout de suite eu de très, très bonnes relations avec Vincent. Tout se passait donc bien entre nous.

Après Landreau puis Enyeama, tu côtoies un troisième (futur) gardien international en la personne de Mike Maignan, dont tu assistes à l’éclosion à partir de 2015. Que retiens-tu de lui ?
Avec Mike aussi, ça s’est très bien passé. Nous avons vite eu un bon feeling et beaucoup échangé, peut-être en raison de nos origines ultramarines communes. C’est un gardien qui avait de grosses qualités et un très fort potentiel. Dans sa tête, il était déjà prêt et formaté pour aller au plus haut niveau, avec une ambition très affirmée. C’était d’ailleurs l’une de ses forces. Pour certains, ça n’aide pas, mais pour d’autres, comme Mike, ça les façonne. C’est ça que je retiens de lui : un gros mental.

Au LOSC, j’ai appris à devenir un joueur de vestiaire, un homme de l’ombre, à accompagner les plus jeunes et il y en avait de très talentueux

Quand tu prends aujourd’hui un pas de recul sur tes années lilloises, qu’en ressort-t-il ?
Je retiens les bons comme les moins bons moments. Ce que les gens ne savent pas, c’est que tout ce qui n’était pas positif à l’époque sur le terrain l’a été dans mon évolution en tant qu’homme. Au LOSC, j’ai appris à devenir un joueur de vestiaire, un homme de l’ombre, à accompagner les plus jeunes et il y en avait de très talentueux de qui j’étais assez proche comme Lucas Digne, Jean Butez, Divock Origi, Soualiho Meïté, Sofiane Boufal, Abdoulay Diaby ou encore Benj Pavard. Je me suis naturellement tourné vers les autres. C’est d’ailleurs aujourd’hui l’essence de mon métier de préparateur mental. C’est un rôle dans lequel je me suis senti à l’aise et qui m’a apporté beaucoup.

En 2014 tu es devenu international martiniquais. Tu nous parles de cette aventure en coupe des nations caribéenne ?
C’était une belle aventure. Je n’oublie pas que c’est René Girard qui a accepté que j’y participe, car à l’époque, les dates de la compétition n’étaient pas alignées sur les dates FIFA. Les clubs n’étaient donc pas tenus de libérer leurs joueurs pour cette épreuve. Jusqu’alors, aucun de mes clubs n’avait accepté que je m’y rende et j’avoue que c’était un petit regret, car la Martinique, ce sont mes origines. J’y vais régulièrement, une partie de ma famille y vit toujours, notamment mon grand frère. Donc quand j’ai eu cette opportunité, je l’ai saisie. Il y avait d’ailleurs aussi déjà une notion de transmission, car j’arrivais avec le statut du joueur pro qui venait de Ligue 1. Ca a été un grand plaisir pour moi et une fierté de pouvoir enfin porter les couleurs martiniquaises.

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Comment pourrais-tu qualifier le football martiniquais ?
C’est un football assez généreux, qui peut vite basculer vers un "football total". Ca attaque, c’est spectaculaire, il faut marquer des buts. Est-ce le sport numéro 1 là-bas ? Il faut savoir que les Antillais sont très sportifs. Ils aiment le football, mais pas seulement. Ils sont notamment portés sur les sports maritimes, mais aussi l’athlétisme ou le cyclisme. La culture sportive y est très prononcée. Il y a aussi le Tour des Yoles pour lequel les Martiniquais se passionnent. Il s’agit d’une grande course maritime de plusieurs jours à bord de yoles, de petites embarcations à voile. C’est vraiment quelque chose d’important en Martinique.

Comment est vu ce match LOSC-Golden Lion en Martinique ?
Il y a évidemment une grosse ferveur. C’est un bel événement pour le football martiniquais. Il est clair que les joueurs du Golden Lion vont venir jouer crânement leurs chances, sans pression. Il se pose forcément la question du niveau physique en comparaison avec une équipe de Ligue 1. Pour ma part, je connais l’attaquant vedette de l’équipe, Kevin Parsemain, qui est une figure en Martinique et avec qui j’ai justement joué en sélection. Il est le prototype parfait du « vrai attaquant » qui sait tout faire : tirer les coups de pied arrêtés, marquer de la tête, bien se placer devant le but. Et mentalement il est très fort. Il est revenu de grosses blessures.

Tu seras au Stade Pierre Mauroy samedi ?
Oui, j’ai été sollicité par France Télévision pour commenter le match, je serai donc là. Ce n’est pas la première fois que je retrouve le Stade Pierre Mauroy. Je suis revenu pour les 75 ans du LOSC, puis pour un Lille-Brest. Je suis même plusieurs fois repassé par le Domaine de Luchin où j’ai revu avec plaisirs des salariés qui étaient déjà là à mon époque. C’est toujours un plaisir de revenir à Lille et dans le Nord. Je m’y suis fait des amis.

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Steeve Elana

Né le 11 juillet 1980 à Aubervilliers (93)
Gardien de but
Clubs : FC Solitaires, ES Colombes, Burel FC, US Endoume, Olympique de Marseille, ASOA Valence, SM Caen, Stade Brestois 29, LOSC, Gazélec Ajaccio, Tours FC, SO Cholet, FC Martigues

International martiniquais (7 sélections)